Mot-clé - les critiques de Philippe

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samedi 14 mai 2016

Dessine-moi un dragon.

Les dragons sont les tatouages préférés des femmes.

De celles qui soulèvent le feu intérieur, et n'ont pas peur de leur passion.

Viens, mon chevalier, combattre mes flammes avec ta lance.

Je ferai fondre ton armure, tu feras fondre mon coeur.

Nos peaux garderont les traces de nos cendres, encres d'âme, ancres d'amour.


AFFICHE_TATOUEURS_TATOUéS


Cette expo enclyclopédique, au musée du Quai Branly, à travers l'histoire et le monde, est pleine de surprises.

Le tout premier tatouage attesté, j'aimerais savoir comment, date de 2500 av. JC, en Europe centrale.

Cela ne m'a pas donné envie de me tatouer quoi que ce soit, mais je crois comprendre mieux celles et ceux qui s'en piquent.

En apparence très individuelles, parfois au coeur de l'intimité, ces marques travaillées sur le corps s'inscrivent dans un groupe social, qu'il soit religieux, hors-la-loi, politique, artistique, lettré ou de fashionistas.

L'imagination des figures, c'est le cas de le dire, transforme le regard du tatoué. En l'enracinant dans l'un de ces groupes, ou un autre encore, elles écrivent l'Autre en lui. Le Créateur des signes est ainsi entré dans leur âme aussi, avec la main et l'outil, gestes d'humanité.

Comme avec la bague au toi, la tatouée proclame avoir abandonné un peu de son soi à un autre.

Et comme toujours, de ces traits singuliers naissent des pluriels : les mots attendus qu'ils susciteront.

Dessine-moi un dragon.

© réédition de 2015 spécialement en souriant pour A* F* ;)

jeudi 25 février 2016

Tchekhov


Une Demande en Mariage et L'Ours de Tchekhov
Mise en scène de Antonio Labati


Personnages qui vont tempêter, se quereller, se déchirer et peut-être se calmer ? Tchekhov nous met en présence de la médiocrité de l'âme des gens. 

Il est rare, surtout dans les petites salles (ici, une jauge d’une quarantaine de places) que le public se lève pour applaudir. Ce fut le cas au Bouffon-Théâtre pour les deux "Plaisanteries" d’Anton Tchekhov, jouées par une jeune et très tonique Compagnie de Seine-et-Marne, "Entre cour et jardin".

C’est un bon choix du metteur en scène, Antonio Labati, d’avoir associé ces deux courtes pièces qui, côte à côte, mettent davantage en relief la vision pessimiste de Tchekhov sur la vie conjugale. On sait que lui-même se maria fort tard, et avec une actrice moscovite qui vivait loin de lui... : manière élégante et pratique d’éviter les frictions quotidiennes dévoreuses de couples.

Dans La demande en mariage, un vieux garçon pataud, résigné à ne plus trouver le grand amour, vient demander la main de sa voisine, une vieille fille tout aussi pressée de se marier. Le père est enchanté de la caser. Enfin. Même si c’est avec ce monsieur qu’il n’estime guère. Tout devrait donc finir aussitôt. Hélas, les deux promis s’étrillent et s’écharpent sur des vétilles (la propriété d’un pré désolé, la valeur respective de leur chien...), et tous deux s’y prennent comme des mégères, comme s’ils étaient déjà mariés depuis mille ans.

L’amour et le coup de foudre qui leur manquent, le voilà dans L’ours : un homme qui vit comme tel et sort soudain de sa retraite pour réclamer le paiement de traites impayées à une veuve recluse. Mais cette fois, la dispute qui naît entre eux conduit à échauffer les cœurs plus que les têtes, et les protagonistes subjugués finissent par s’étreindre sous l’œil médusé de l’impotent serviteur armé. (Il était aller chercher un fusil pour chasser définitivement ce méchant Ours.) Comme quoi, même dans le meilleur des baisers, une menace veille...

Tout cela est joué vivement, parfois avec un peu trop d’agitation et de fébrilité scéniques, mais comme le tout est emporté par une réelle générosité des acteurs (qui mouillent, au sens propre, leur chemise), le public passe un agréable moment et rit souvent.

J’ai trouvé Antonio Labati (le vieux garçon puis l’Ours) beaucoup plus dense dans ses moments tragiques ou colériques mais il a quelques effets comiques et des mimiques très efficaces. Jean-Christophe Allais (le père puis le serviteur) gagnerait à donner à son premier personnage un peu plus d’épaisseur "stanislavskienne" (Stanislavski créa à peu près toutes les pièces de Tchekhov et conçut une géniale "Formation de l’acteur") mais il est particulièrement touchant et juste dans son second rôle, nuancé et attentif. Enfin, la lente métamorphose de Fanny Malterre, seule en scène, pour assurer le passage entre les deux "Plaisanteries" (terme de Tchekhov) est éblouissante. Là se découvre le cœur du travail de l’acteur. Elle se déshabille (très pudiquement) du rôle de la vieille fille sévère et empotée, dénoue sa queue de cheval, glisse une longue robe noire et devient une autre femme, aristocrate et délicate, fine et voluptueuse ; le tout s’épanouissant dans la musique de Bellini. Excellent. Je pense que Tchekhov aurait beaucoup apprécié cette joyeuse exubérance apportée à ses textes grinçants... "Le début du bonheur conjugal", dit-il... 

Philippe Dohy


 


Une Demande en Mariage et L'Ours de Tchekhov
Jusqu'au 13/07/2002
Du mardi au samedi à 20 h 30. 

Bouffon Théâtre
28, rue de Meaux
75019 PARIS (Métro Colonel-Fabien)  

Réservations : 01 42 38 35 53

jeudi 27 août 2015

Millénium 4 ? Une question à onze millions €

Je ne l'ai pas encore lu.

Mais je ne suis plus pressé de le lire après avoir lu :

  • "Le retour réussi de la saga. La découverte d’une intrigue imprévisible, ici souvent haletante. " Le Monde.
  • "L’intrigue est plus ténue, les rebondissements plus prévisibles. Si vous pouvez lire cette critique aussi tôt, c’est aussi que la brique de 500 pages s’absorbe plus vite que celles de Larsson. Bémol, non des moindres, qui marque la différence." La Libre Belgique.

482 pages, 23 € . Paru ce matin. Premier tirage de 500.000 exemplaires => 500.000 x 23 = 11.500.000 € = 75.555.000 francs d'autrefois, juste pour avoir une idée (haletante).


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© Macha Séry, Le Monde > http://www.lemonde.fr/livres/articl...

© Alain Lorfèvre, La Libre Belgique > http://www.lalibre.be/culture/livre...

mardi 18 août 2015

Que faire de mieux à Paris ?

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Encore une femme génie.

Les encres noires de Xu Ying vibrent autour de ses personnages, des gueules tirées des romans de Dickens ou de la Chine ignorée.

Ses couleurs sont des jeunes filles aux grands yeux dont les frissons attirent les dieux de toutes les religions, et une Madone à l'enfant.

Cette exposition exceptionnelle déploie ses fastes dans une mairie déserte de Paris entre une machine à café et des gardiens blasés.

Vous ne regretteriez pas d'y aller, vite, pour pouvoir y revenir.

Dans les dix, voire cinq ans, Xu Ying entrera au MAM ou à Pompidou.

Chaque ligne de cette jeune artiste géniale est une ligne de vie.

Jusqu'au 24 août 2015.

Mairie du 10ème, Paris, Métro Château d'Eau ou Gare de l'Est.


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