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De "bruyantes bimbos bombasses" ?

Je n'essaie pas de vous convaincre de devenir femenistes ou féministes, ce serait stupide. C'est un engagement de conscience, réflexion et maturation que nul ne peut vous imposer sous peine que sa durée en soit fort courte.

Mais comme à bon nombre de gens, ce mouvement me semblait bruyant et bimbo bibelot, jusqu'à ce que je lise l'excellent livre de Galia Ackerman, Femen, ouvrage captivant et très bien écrit ; avec, par exemple, une variation subtile de l'écriture pour chacune des quatre fondatrices).

J'ai découvert qu'il ne s'agissait pas du tout d'exploiteuses médiatiques à des fins de peoplisation personnelle de petite gloire provisoire comme le laissait entendre les médias émoustillés.

Comme c'est un sujet que je connais maintenant un peu plus, je perçois davantage la forte distorsion entre ce qu'en rapporte la majorité de journaleux excités par des nichons nus, ne présentant d'ailleurs, sauf rare exception, que les plus jolis, et la réalité de leur combat très politisé, lucide, pas écervelé.

Il me semble intéressant de souligner ce grand écart entre les faits, les protagonistes, leur réflexion au travail, et cette sélection formatée qu'en donne "la presse". Car cela montre aussi le peu d'éthique professionnelle, forcément à l'oeuvre pour les autres sujets, des journaleux au détriment du public mais aussi des vrais journalistes dont ils ne cessent de ternir la réputation et le métier.

Au départ, les quatre futures Femen étaient des étudiantes tout à fait "normales", pas plus politisées que tous les jeunes ayant grandi dans le système soviétique finissant. Elles avaient environ cinq ans à l'effondrement du mur.

A l'université, devenue très chère suite à la libéralisation de l'enseignement mais aussi à cause de la corruption (bourses attribuées aux enfants d'oligarques !), elles se sont rendues compte que leurs études n'étaient que le prétexte pour "trouver un bon mari" car les opportunités professionnelles réelles pour les filles de condition modeste étaient fort rares ; sauf à devenir putain pour touriste.

Les Femen ont approfondi leur réflexion politique et féministe, d'abord sans toutes se connaître. Elles peinaient à rassembler et motiver leurs camarades étudiantes qui craignaient de déplaire aux possibles mâles avantageux et charmants, n'est-ce pas ?

Elles essayèrent alors de petites scènes publiques avec de brèves interventions théoriques. Rien n'intéressa personne.

C'est alors que l'une d'entre elles eut l'idée de se produire seins nus. Les médias accoururent alors, seulement, et le succès fit le reste. La seule manière de faire découvrir leurs objectifs et analyses étant de les résumer d'abord sur leur buste et leur ventre.

Ventre des femmes, ventre des lettres.

Philippe Dohy

Lire les réponses très intelligentes de Galia Ackerman à 5 questions sur son livre Femen. > http://www.perspectives-ukrainienne...

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