L'interview absurde de Didier Porte,
à propos de son dernier livre broché,
par Lord Gogo Duchmoll, le baba des people.

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C'est dans la rieuse ceinture verte de Paris que Didier Porte nous a accueilli, et dans sa vaste demeure, nous, c'est-à-dire notre moitié anglaise et notre moitié belge.

Didier Porte est un humoriste politique de classe hautement supérieure, mais qui sait rester drôle avec le peuple, qui réside dans un vaste appartement bon enfant (nombreux jouets casse-gueule) où chaque mur tient debout, preuve que ça ne va pas si mal que cela pour lui, non, non, ce magnifique logis n'est pas un squat.

Nous nous assîmes, non pas l'un l'autre, mais séparément, dans de larges divans accueillants, si accueillants que c'est à croire que Didier Porte recrute pour un obscur parti politique pétri d'idéaux grandioses monnayables rapidement.

Tandis que je présidai à l'installation des instruments nécessaires à ma fonction scripturaire, je revêtis aussi mon casque de sécurité Duchmoll obligatoire, à savoir le béret basque rouge protecteur cérébral. Soyez prudent au volant et sortez couvert.

G - Cher Monsieur, cher humoriste, cher ami français, vous vous appelez Didier, certes, mais Porte aussi. Alors, pourquoi ne pas avoir intitulé votre magnifique ouvrage de 254 pages pour un prix alléchant, non pas "insupportable" mais "portable" ? d'autant plus qu'il l'est facilement, portable !

D - Parce que "portable", ce n'est plus vraiment porteur. Commercialement. Les gens ont déjà un portable, ils ne vont pas en acheter un deuxième seulement parce qu'il y a mon nom dessus. D'ailleurs, Porte ce n'est pas mon vrai nom. Je l'ai pris pour faire rêver notre public : une porte, on peut toujours finir par l'ouvrir, et moi, je ne suis pas du genre à la fermer.

G - Ah ! Pouvez-vous nous dire quel est votre vrai nom ?

D - Non. Je tiens à protéger ma famille.

G - C'est bien vrai, le temps est couvert... Didier Porte, dès le début de votre livre à 14,90 € pour 254 pages, vous attrapez le lecteur, ou trois lectrices, par un crescendo éblouissant. Sur la couverture, un mot, "Insupportable", le reste ne compte pas, un sous-titre est un sous-fifre. Puis, la première phrase du texte fait 2 mots, la deuxième, déjà 17 ; la troisième : 23 ; et cela continue : 32, 47, 56 même ! Pourquoi ?

D - Parce que j'ai voulu avoir une progression dramatique et déboucher, si je puis dire, brutalement sur EMPROSÉ car j'emprose le président !

G - Vous l'emprosez, vous voulez dire que vous l'enfifrez ?

D - Parfaitement. Je le gomorrhise, le pointe, le mise, le tape dans l'oignon, lui dore la lune, le case, l'endauffe, l'empétarde, l'entrouducute, l'enfauconne, l'empoupe, l'encaldosse, l'encale, l'emjambe, l'empapaoute. Je l'ai dans l'oeuf. Je lui mets la rosette. Je le derge, l'écluse du caoua, lui tourne le feuillet, le tringlomane dans le zéro et le chevauche à l'antique.

G - Bravo !! En quelque sorte, vous lui faites traverser l'histoire d'un geste, cette geste qui le socratise jusqu'à la prise de la pastille.

D - Bien dit, my Lord, la pastille. Et je lui cause à rebours.

G - Chacun est libre de sa vie privée, enfin pour quelque temps encore, profitons-en. Didier Porte, vous vous êtes fait ardemment postfacer par Raoul Vaneigem, dont la vigoureuse belgicité n'est plus à faire. Pourquoi ?

D - Parce que je trouve indispensable de donner du travail à un peuple dans la gêne, et je dirais même dans le génocide culturel, tant ce qu'on fait aux francophones belges est désastreux. J'ai voulu aussi rendre service à un très grand intellectuel trop peu lu et écouté de ce côté-ci du Quiévrain, qui veut quand même dire "bois aux chèvres", je vous le rappelle. Quoi de mieux pour faire sortir le loup du bois ? De plus, il bosse gratos ; et c'est d'ailleurs la principale raison ; et c'est même la seule, à vrai dire.

G - En somme, Didier Porte, le faire travailler plus en gagnant moins, c'est une bonne manière de l'endurcir à ce qui l'attend ?

D - Oui, à son âge, il rêve d'être mieux endurci.

G - Ah ?

D - Vous avez quand même Virginie Efira !

G - Oui, et Christine Ockrent.

D - C'est vrai, c'est vrai. Mais elle est beaucoup plus chère.

G - Vos liens merveilleux avec l'un de nos pays nous touche effrontément, vous me savez belgo-écossais. Nous ne pouvons donc que vous encourager à persévérer dans les postfaces hardies grâce auxquelles vous pourriez décrocher une chronique quotidienne sur Belgique Cul, voire Angleterre Cul, par mon entregent.

D - Vous êtes très gentil, Lord Gaga bobo, mais

G - Gogo baba.

D - Dans la vie, il y a toujours des Go! et des bas, my Lord. Mais Angleterre Cul me semblerait trop absurde pour ma pratique de la langue anglaise. En revanche, Belgique Cul élargirait le bassin de ma clientèle ; non pas en quantité puisque c'est un petit pays de plus en plus petit, mais en qualité. Les Belges ont tellement d'humour ! et ils ne sont pas susceptibles de se choquer lorsqu'on se propose d'empastiller un président de république du sud.

G - Didier Porte, vous n'ignorez pas que Raoul Vaneigem, votre postfaceur, est un ultragauchiste anarcho-autonome caractérisé. Or la révolution belge de 1830 commença avec un opéra patriotique, la Muette de Porte ici. Porte ici, Porte là... Didier Porte, préparez-vous une nouvelle révolution, ici ou là ?

D - My Lord, vous avez décelé habilement ce puissant déterminisme historique auquel je ne saurais me soustraire, fut-ce au prix de devoir laisser ma marque dans l'Histoire.

G - Quand même, vous ne trouvez pas ça bizarre, Didier Porte, vous qui dominez les siècles avec cette érudite aisance que vous envie si souvent qui vous savez, que le personnage principal d'un opéra soit une muette ?! Surtout d'un opéra qui a déclenché une révolution ? Cette muette représenterait-elle la majorité silencieuse qui voudrait s'exclamer "Assez ! Cessez ça !!" ?

D - Evidemment, my Lord, bravo, vous êtes en plein dedans... La Grande Muette, n'est-ce pas l'armée ? Et n'est-ce pas l'armée qui a permis la révolution tunisienne. Vous voyez, Duchmoll, il y a là tout un faisceau d'indices qui donnent à penser que la majorité des militaires appartiennent à la mouvance ultra-gauche anarcho autonome, courant encore plus actif depuis le Général Alcazar...

(à suivre)